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Séminaire 3 – 28/09/25: Le volcanisme du rift de la Terreur (Mer de Ross Antarctique)

Présentation par Carole Berthod (Physicienne-adjointe, IPG Paris)

Carole Berthod a embarqué sur la mission océanographique NBP25-01 du11/02/2025 au 16/04/2025 sur le Nathaniel B. Palmer composée de trois équipes qui se sont focalisées sur la volcanologie, la biologie et les hydrates. Elle nous fait le récit de cette mission.

Contexte géomorphologique et géologique

L’activité tectonique et volcanique de la zone commence au Mésozoïque il y a environ 200 Ma lorsque l’Antarctique se détache progressivement du supercontinent Gondwana. Le système de rift antarctique ouest (WARS) s’étend sur une surface de 3500 km × 750 km et présente une activité de rift multi-phasé (Figure 1). L’expression du volcanisme la plus récente (< 40Ma) est localisée sur l’île de Ross avec le Mont Erebus qui est actuellement en activité (présence d’un lac de lave au sommet) et dans le rift de la terreur localisé dans la Mer de Ross (0.13 – 6.8 Ma, Rilling et al., 2009).

Figure 1. Esquisse géologique de l’Antarctique (Panter, 2021).

Objectifs et opérations prévues

L’objectif de la mission, portée par Masako Toninaga (WHOI, Woods Hole Oceanographic Institution) et Kurt Panter (BGSU, Bowling Green State University), est entre autres de déterminer l’origine du volcanisme de la mer de Ross. Une des deux hypothèses suggère que le volcanisme de la zone soit associé à une remontée d’un panache mantellique, c’est-à-dire à la remontée d’un matériel chaud depuis le manteau. L’autre hypothèse propose plutôt un volcanisme associé à un amincissement crustal transtensif dextre, autrement dit, à un régime extensif horizontal dans un contexte de faille transformante dextre.

Les principales opérations pour étudier ce volcanisme ont été les suivantes : (1) une cartographie du fond marin en utilisant un sondeur multifaisceau (SMF, bathymétrie), (2) une imagerie du fond de mer à l’aide d’un Tow Cam (caméra embarquée et tractée par le navire), (3) des mesures de flux de chaleur à l’aide d’une sonde de flux thermique. Pour ce qui est de l’étude du plancher marin, divers prélèvements de sols ont été effectués à l’aide (4) d’un carottier Kulemberg, (5) d’un Smith-Mac (pince) et (6) d’une drague à roche.

Rôle des glaces, conditions de travail et réalisations

La campagne est lancée à l’entame de l’hiver austral, ce qui, mis à part de magnifiques paysages et couchers de soleil (Figure 2), a soumis l’équipage à deux contraintes principales : la gestion des glaces et la météo capricieuse. Ces contraintes ont eu une influence majeure sur le déroulé de la mission.

Figure 2. Coucher de soleil et Mont Erebus lors de la mission océanographique NBP25-01 (comm. pers. C. Berthod)

Il a fallu débuter par un carottage au niveau de la baie de Lewis au pied du mont Erebus pour anticiper l’apparition des glaces. Ces carottages n’ont malheureusement pas été concluants à cause de la compacité de la vase qui a empêché d’accéder aux profondeurs souhaitées.
La mission s’est poursuivie plus au nord avec la réalisation de multiples dragages, le déploiement de sondes de flux de chaleur, du Tow Cam et du Smith-Mac. Ce dernier a d’ailleurs permis d’apporter une première preuve d’une activité volcanique récente, révélant une profusion de vie sur les fonds marins.

Pendant ces opérations, la saison avançant, la glace progressait : de petits cercles de glace, appelés par l’équipe scientifique « pancakes », se sont agglomérés en une banquise continue et épaisse de plusieurs mètres (Figure 3), obligeant même le brise-glace à faire des détours.

Figure 3. Glace en « pancakes » lors de la mission océanographique NBP25-01 (comm. pers. C. Berthod)

Au-delà de l’impact sur la navigation, la glace perturbait également l’acquisition des données. Les chocs contre le bateau provoquaient des sons pouvant atteindre 72 dB, ce qui affectait les mesures bathymétriques. Pour pallier ce problème, le navire effectuait une première fauchée avant de repasser une seconde fois en suivant la trace ouverte. Les températures et l’aspect vaseux du sol rendaient les retours de dragage particulièrement difficiles. L’avancée des glaces a rendu impossible la progression plus au nord, comme cela était initialement prévu. La météo a également limité certains dragages plus à l’ouest en raison de vents violents.

Malgré ces contraintes, les dragages ont permis d’échantillonner de grandes quantités de roches (Figure 4 ci-contre), dont une partie provenant d’une zone, le Flapjack Field déjà étudiée lors d’une précédente campagne (Busetti et al., 2024). Celle-ci avait révélé la présence de nombreux édifices monogéniques qui avaient alors été identifiés comme des volcans de boue.

Figure 4. Tri de roches draguées sur le pont du R/V Nathaniel B. Palmer lors de la mission océanographique NBP25-01 (comm. pers. C. Berthod)

Grâce à la collecte de données multidisciplinaires, cette campagne va permettre d’apporter d’importantes contraintes sur l’origine et la mise en place du volcanisme dans la région. Les premiers résultats sont en cours de publication dans la revue « Communications Earth & Environment » et trois étudiants en Master à l’université d’État de Bowling Green (Ohio) travaillent actuellement sur les échantillons collectés lors de cette campagne.

Référence 1: Rilling et al. (2009): New determinations of 40Ar/39Ar isotopic ages and flow volumes for Cenozoic volcanism in the Terror Rift, Ross Sea, Antarctica

Référence 2: Panter (2021): Antarctic volcanism: petrology and tectonomagmatic overview

Synthèse réalisée par Jules

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