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Témoignage du commandant à bord de la mission HAITI-TWIST

Philippe, commandant à bord du Pourquoi Pas?

Quel est ton rôle à bord?

Alors, je suis commandant. Être commandant, c’est être responsable de l’expédition, c’est être celui qui est responsable de la sécurité et du bon déroulement de toutes les opérations qui doivent être réalisées. Plus concrètement, c’est un peu l’interface entre le bateau et la terre pour gérer tous les problèmes comme les arrivées d’escale et, dans le cas de l’océanographie, je suis un peu l’interlocuteur privilégié du chef de mission. Au début de chaque campagne, on me donne une liste des travaux à effectuer durant la campagne, et le rôle du commandant est de réussir à remplir tous les objectifs sans casse matérielle et sans accidents humains.

Quelle a été ta formation ?

On a tous la même formation, le même brevet polyvalent, on a fait l’école de la marine marchande. Après, c’est à l’ancienneté et au mérite (peut-être un peu ?) que l’on monte les échelons. Ensuite, on est nommé par l’armement (la compagnie qui gère les bateaux).

Quelles sont les compétences nécessaires pour être commandant ?

Ce sont surtout des compétences humaines : la gestion du stress, être capable de communiquer avec les gens, que ce soit l’équipage ou les supérieurs hiérarchiques. Il faut également des compétences techniques que l’on acquiert avec le temps: en effet, pour arriver commandant, il faut au moins 10-15 ans de navigation.

Quels sont les problèmes auxquels tu peux être confronté en tant que commandant ?

Il y en a plein. Il y a les problèmes médicaux ou ce que l’on appelle les « évinçades » lorsque l’on est obligé d’évacuer quelqu’un pour cause sanitaire. Il y a également des avaries qui peuvent avoir des conséquences sur le bon déroulement de la mission, comme le mauvais fonctionnement du matériel, par exemple le treuil (mais il y a toujours des solutions). Enfin, il y a des problèmes liés à la sécurité comme le départ d’un incendie – c’est ce que je crains le plus – ou bien une mauvaise météo, ou encore les problèmes liés à la gestion d’une escale. Il y a beaucoup de sources de problèmes, il faut donc trouver des solutions. Ce que j’appréhende le plus sur un bateau reste l’incendie, c’est pour cette raison que l’on mise beaucoup sur la prévention et la sécurité.

Quels sont les avantages et les inconvénients de la vie en mer ?

Le gros avantage d’être marin, c’est le fait d’avoir une coupure entre le travail et les congés. En effet, nous naviguons au total 6 mois dans l’année, ce qui signifie que nous avons 6 mois de congés. Et lorsque nous sommes en congés, nous sommes réellement coupés du travail. Ce n’est pas facile à vivre pour nos familles à cause de notre absence, mais quand nous rentrons, nous sommes complètement disponibles. On est très présents tout en étant loin.

Es-tu hors quart ?

Oui, je suis hors quart, mais au moindre problème, on m’appelle.

Est-ce que tu aurais une anecdote à nous raconter ?

Ce n’est pas facile ta question, parce qu’il y en a plein… Je dirais que les meilleurs moments, c’est plutôt le côté humain, c’est le plus intéressant dans ce métier-là. Nous avons tous le même brevet, celui de marine marchande, donc nous aurions très bien pu travailler sur des porte-conteneurs ou des pétroliers, c’est-à-dire aller d’un point A à un point B. Mais nous avons choisi de faire quelque chose de complètement différent. Nous travaillons sur des missions avec du personnel, des gens complètement différents sur chaque mission. À chaque embarquement, nous rencontrons un tas de personnes. Les
meilleurs moments de navigation, ce sont ces rencontres, ces gens-là comme Sylvie, Frédérique ou encore Walter qui était là au leg précédent. Ce sont des personnes que je connais depuis très longtemps et c’est toujours plaisant de les croiser de mission en mission. Donc c’est plus l’humain qui me marque. Cependant, il y a toujours des escales mythiques, des moments en navigation comme le détroit de Magellan, ou encore des images comme l’arrivée à Rio – c’est magnifique depuis la mer – ou l’arrivée en Afrique avec des odeurs très spécifiques.

À quoi ressemble une journée type ?

C’est très variable, cela dépend des travaux qui sont demandés. Sur cette mission, il y a une cellule carottage, mais dans le cas d’autres travaux comme le dragage, ce serait moi qui serais levé toute la nuit pour réaliser ces opérations. C’est donc très variable d’une mission à l’autre. J’ai une certaine quantité de travail à fournir, notamment la préparation des prochaines escales, ce qui comprend les commandes de vivres, le matériel à débarquer, les intervenants qui vont venir sur le bateau…

As-tu toujours travaillé sur des navires scientifiques ?

J’ai commencé à naviguer chez Genavir en 1992 donc je n’ai fait que ça. Je ne me voyais pas faire autre chose, j’ai un travail passionnant. Je travaille sur le N/O Pourquoi Pas ? depuis 2016. C’est un bateau sur lequel j’aime bien travailler car c’est le plus récent et le mieux conçu pour travailler avec une norme portique et beaucoup d’autonomie. Mais le plus important sur un bateau, c’est l’équipage et l’ambiance sur le bateau.

Merci Philippe!

Témoignage recueilli par Mina, au nom des étudiant.e.s de l’Université Flottante

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