Salomé Pellé, Eugénie Dufour, Alycia Valvandrin, Sara Sergi, Christophe Mocquet
Les trois derniers jours ont été marqués par l’arrivée au premier Leg de la campagne RESILIENCE: notre premier terrain d’échantillonnage. Le but de ce dernier est d’échantilloner à petite échelle les masses d’eaux et les écosystèmes en marge d’un tourbillon anticyclonique se trouvant actuellement au nord-ouest de l’île Europa, dans le Canal du Mozambique. Un tourbillon cyclonique s’est également formé au sud du premier, nous permettant ainsi d’étudier l’interface entre ces deux structures dynamiques. Si vous souhaitez en savoir plus sur les tourbillons et la circulation dans le canal du Mozambique on vous renvoie au séminaire que Pierrick Penven nous a donné à bord sur ce sujet.
Les stations battent leur plein de jour comme de nuit, et après des premier retards liés aux conditions météorologiques et à des problèmes matériels, les équipes commencent à se roder et les calendriers des opérations sont de plus en plus précis. Heureusement, car pendant ce premier Leg 1 nous avons un vrai marathon de stations impliquant des nombreux instruments scientifiques.
Le premier chalut a été réalisé le matin du 27 avril et il permettra de comparer les prises avec les mesures en continu effectuées par l’acoustique active. En effet des échosondeurs sous la coque du Marion envoient des signaux acoustiques (d’où le nom acoustique « active ») à différentes fréquences et analyses les signaux reçus réfléchi par les organismes marins, mais aussi par les bulles ou les sédiments en suspension. L’utilisation de plusieurs fréquences combinées avec les prélèvements par chaluts permettent d’identifier les organismes sur les enregistrements.
Certain.e.s étudiant.e.s ne se sont pas accommodé.e.s à l’odeur émenant des prises effectuées par le chalut et le travail en milieu fermé dans le laboratoire installé dans un conteneur. Son contenu a été trié, découvrant multiples goodies tels que des tongues (photographie exclusive ci-contre). Des prises plus autochtones ont été heureusement effectuées par ailleurs, telles que calmars, poissons volants, crustacés et siphonophores.
Le filet multinet, un instrument doté de cinq filets avec une maille de 200 μm, est été déployé à chaque station afin de capturer du zooplancton à différentes profondeurs entre la surface et 200 m. Le zooplancton correspond à de animaux microscopiques transportés par les courants, qui se nourrissent du phytoplancton (les micro algues; cela est en réalité un peu plus compliqué, si ce sujet vous intéresse vous pouvez lire le résumé du séminaire de Fernando Gomez). Les échantillons obtenus ont été fixés au formol pour conserver les organismes et permettre l’identification des espèces au retour sur la terre ferme à l’Université Nelson Mandela en Afrique du Sud.
La rosette et l’ensemble des capteurs installés sur celle-ci (dont la célèbre CTD) nous permettent, comme à chaque station, d’obtenir des informations sur les propriétés des masses d’eau (température, salinité, fluorescence, oxygène, turbidité, vitesses des courants) sur toute la colonne d’eau, ainsi que de prélever de l’eau à différentes profondeurs. Les 19 bouteilles sont fermées lors de la remontée à des profondeurs choisies en fonction des mesures effectuées pendant sa descente. L’eau des bouteilles est ensuite repartie entre les équipes à bord.
Plusieurs litres d’eau de mer ont été filtrées depuis la rosette afin de récupérer l’ADN environnemental présent à différentes profondeurs. Ces traces d’ADN permettent d’estimer la présence de certaines espèces dans une zone donnée par une méthode non invasive. Les résultats pourront être comparés aux observations visuelles de mégafaune réalisées durant la mission.
Juste avant le Leg1, le Bombix, un système de mouillage d’1km de long comportant une multitude d’instruments a aussi été mis à l’eau afin de détecter la présence de baleines mais également d’acquérir des données physico-chimiques de cette zone.
Pendant ce temps, les équipes chargées des oiseaux et des mammifères marins poursuivent leurs observations. L’objectif principal de la campagne RESILIENCE est de comparer les observations des prédateurs supérieurs avec les mesures physico-chimiques et celles du plancton. Par exemple, des fous à pieds rouges ont survolé le bateau à la recherche de poissons volants.
Pour celles/ceux qui ne sont pas en quart à 16h, les séminaires continuent à ameuter du monde dans la salle de conférence: Anne Lebourges, ingénieure de recherche au LEMAR, nous a présenté des techniques d’analyse d’acoustique active pour l’étude des communautés pélagiques (ie les organismes présents dans la colonne d’eau). Les étudiant.e.s desormais profitent des séminaires pour présenter aussi leurs stages de Master 1 : Guerric et Alycia ont ouvert la danse en nous parlant des nématodes dans les mangroves et de la polyculture aquatique (l’aquaculture basée sur la production de différentes espèces). Le début d’une longue série nous l’espérons !
Enfin, la journée du 27 avril s’est terminée dans la joie et la bonne humeur après l’annonce d’un bateau libre de tout virus aérosol (cc COVID-19), nous permettant enfin de profiter des jolis sourires et des moustaches des personnes à bords.